Shigeru Miyamoto était l’invité d’honneur de Japan Expo cette année. Les organisateurs avait donc donné rendez-vous à tous les fans de Nintendo en ce vendredi après-midi pour une masterclass exceptionnelle; un événement constituant une première mondiale puisque c’était la première fois que le papa de Mario se livrait à un tel exercice de style. Pour rappel, Miyamoto avait annulé sa venue sur le salon à la dernière minute l’an dernier pour raisons personnelles. Il était donc attendu de pied ferme par la communauté de joueurs.
Si cet événement était animé par le volubile et gai luron Bertrand Amar, journaliste bien connu spécialisé dans l’industrie vidéoludique, la traduction était quant à elle assurée par Grégoire Hellot, directeur de collection des éditions Kurokawa.
Sommaire
Un grand enfant à Japan Expo
Après un bref discours de la part des co-fondateurs de Japan Expo que l’on a senti quelque peu émus sur scène et cela peut se comprendre, il était enfin grand temps de laisser place aux festivités. C’est après une courte vidéo de présentation et sous les applaudissements que le créateur de génie de la firme de Kyoto fit son apparition sur scène, avec son air jovial et sa bonhommie qui le caractérise si bien.
Voir Miyamoto à quelques mètres à peine, c’est un rêve de gosse qui se réalise.
Je pense que chaque personne dans la salle a pu se remémorer ses meilleurs souvenirs de joueurs lorsque le maître de cérémonie est apparu. Très clairement en ce qui me concerne, voir Miyamoto à quelques mètres à peine, c’est un rêve de gosse qui se réalise.
Après nous avoir rappelé que Nintendo avait travaillé sur l’audioguide du musée du Louvre sur 3DS (un peu d’autopromotion ne fait jamais de mal), il était temps de passer aux choses sérieuses avec une masterclass divisée en deux grandes parties dédiées à deux jeux en cours de développement : Star Fox Zero et Super Mario Maker, tous deux présents et jouables sur les bornes installées sur le stand Nintendo.
Star Fox Zero
Avant de présenter plus en détail le jeu, Miyamoto a souhaité revenir sur les origines de la série. Pourquoi donc les joueurs devaient manœuvrer leurs vaisseaux à travers des portes ? Pourquoi avoir choisi un renard comme personnage principal ? Autant de questions qui méritent réponses !
Eh bien c’est finalement assez simple. Shigeru Miyamoto est originaire de Kyoto et il s’est inspiré du temple Fushimi-Inaro pour créer Star Fox. Si le nom ne vous dit peut-être rien, vous reconnaitrez plus facilement le lieu en jetant un œil à la photo ci-contre. Ce sont donc les centaines de torii présents sur le site du temple shinto qui ont donné l’idée à Miyamoto d’insérer des portes sous lesquels les vaisseaux devaient passer.
En ce qui concerne Fox McCloud, le pilote-renard émérite et héro de la saga, ce sont les deux statues de renards présents devant le temple qui ont donné l’idée au chara-designer de l’époque qu’était Miyamoto. De plus, il indiqua à l’audience qu’une équipe de baseball s’appelait les Inari Fox. Il tenait alors son personnage principal.
Le « patron » de Nintendo s’émerveille de tout, c’est beau !
Nous avons eu droit ensuite à une démo de gameplay en direct, l’employé de Nintendo ayant indiqué après coup qu’il n’avait eu que deux jours pour s’entraîner sur ce jeu qu’il ne maîtrisait pas auparavant. Challenge remporté haut la main avec un score de 190 points sur 200 points. Une preuve que la prise en main semble être relativement aisée. Durant cette démo, on a pu voir un Miyamoto s’enthousiasmer en gesticulant lorsque le vaisseau se transformait en « walker », un robot ayant la capacité de marcher. En effet, lorsqu’il se transforme au sol, l’engin pousse visiblement un petit cri d’autruche… Cela montre encore une fois que le « patron » de Nintendo s’émerveille de tout, c’est beau !
Pour clôturer sur Star Fox, nous avons eu droit à une démo du jeu de 20 secondes pour nous indiquer que le vaisseau pouvait être pris au piège dans un rayon laser d’un boss. Enfin, nous avons pu voir un véhicule avec deux hélices sur les côtés et un robot pouvant se déplacer seul et permettant d’explorer des zones minuscules. Un gameplay attrayant et qui changera clairement des épisodes précédents.
Super Mario Maker
Le maître et son bras droit sur la même scène, on ne pouvait rêver mieux mais ce n’était que le début.
Il était grand temps de passer sur les nouvelles aventures du plombier moustachu. Quoi de mieux que d’avoir le producteur du jeu et ami de trente ans du maître pour nous en parler ? C’est ainsi que Takashi Tezuka s’est installé sur scène après une vidéo de présentation pleine d’humour, à la sauce Nintendo. Le maître et son bras droit sur la même scène, on ne pouvait rêver mieux mais ce n’était que le début.
Tezuka fut le premier game designer à être embauché par Miyamoto qui lui avait demandé de réaliser une histoire drôle en quatre cases. En était ressorti un personnage avec une barbe qui pousse de case en case. Rien d’époustouflant ou de fondamentalement drôle et pourtant, l’idée a plu. Si tout le monde souhaitait intégrer la firme comme designer à l’époque, Tezuka aurait répondu à Miyamoto que pour lui cela lui était tout à fait égal : créer des personnages de jeux vidéo ou des habits pour enfants, il n’avait aucune préférence. Il n’en fallait pas plus à l’audacieux Tezuka pour convaincre Miyamoto et ainsi rejoindre les rangs de Nintendo.
Super Mario Maker, c’est le jeu de création par excellence : réaliser un niveau de jeu vidéo, qui plus est de Mario, qui n’en a jamais rêvé ?
Pour nous présenter au mieux cette future pépite, Tezuka s’est ainsi prêté au jeu en réalisant très rapidement un niveau en deux écrans demandant un peu de jugeote avant de dévoiler un niveau créé également par ses soins sur le thème de Kyoto.
La masterclass s’est poursuivie avec une belle surprise : la création d’un niveau de Super Mario Maker par Michel Ancel, le papa de Rayman. Et quel niveau ! Un PacMario ! En guise de billes, des pièces et en guise de fantômes et bien … des fantômes. Miyamoto et Tezuka se sont essayés sur ce niveau afin d’établir le meilleur score. Un challenge remporté par le grand enfant Shigeru. Il fallait voir Miyamoto, gamepad en main, poussé les petits cris de Mario en fredonnant ensuite un air du jeu : un moment magique. Mon seul regret, ne pas avoir pu immortaliser cela en vidéo puisque cela était interdit.
Quoi de mieux pour finir en beauté qu’un nouveau niveau designé par le tandem Miyamoto et Tezuka sur le thème cette fois de … Paris ! Visite guidée de la capitale par Bertrand Amar incluant Arc de Triomphe, basilique du Sacré Coeur, Tour Eiffel. C’est vraisemblablement un peu tremblant qu’il a pris le gamepad en main lorsque Miyamoto lui a demandé de bien vouloir s’essayer sur ce niveau. Qu’importe la performance, le cœur y était.
La tornade Tsubasa Sakaguchi
Avant de clôturer sa masterclass, Miyamoto a voulu mettre en lumière un « jeune » talent en devenir en la personne de Tsubasa Sakaguchi, en charge de Splatoon. C’est avec une belle énergie que l’un des nouveaux prodiges de Nintendo a déboulé sur la scène muni d’un fusil à « splatooner » le public et il ne s’est pas fait prier pour courir au bout de la scène et utiliser son arme.
Splatoon c’est le tout nouveau jeu du moment sur Wii U. C’est assez logique pour Nintendo de ne pas en faire la promotion mais c’était aussi l’occasion pour Miyamoto de faire passer un message à Japan Expo.
Des messages clairs de la part de Shigeru Miyamoto
Cette masterclass ne nous a pas appris grand chose sur les deux jeux présentés mais ce n’était évidemment pas le but recherché. Cet événement était clairement exceptionnel dans le sens où Miyamoto et Tezuka se sont essayés eux-mêmes sur Super Mario Maker, gamepad en main, le tout dans une ambiance très bon enfant mais comment pourrait-il en être autrement avec Shigeru Miyamoto, créateur de génie qui a su garder une âme de gosse. Ce n’est pas sur le fond que Miyamoto a souhaité mettre l’accent mais bien sur la forme en faisant de sa masterclass un moment extrêmement ludique voire magique.
Shigeru Miyamoto a clairement exposé la ligne directrice de Nintendo. Si il entend parler de globalisation et d’avancée technologique dans l’univers du Jeu Vidéo, son but est de continuer à divertir et à faire rêver des millions de joueurs sur des jeux accessibles.
Le véritable message que Shigeru Miyamoto a voulu faire passer durant sa masterclass pourrait se résumer ainsi : si Nintendo s’appuye toujours sur ses licences phares telles que Mario en apportant aux joueurs une nouvelle façon de jouer, la firme saura perdurer après le départ de Miyamoto et trouver le succès grâce au talent de la nouvelle génération de designers / directeurs. Voir réunis sur la même scène Miyamoto, Tezuka et Sakaguchi n’était pas un hasard. Le message est bien passé.
Enfin, Miyamoto avait retenu trois questions de la part d’utilisateurs de Twitter. Une personne souhaitait savoir si aujourd’hui, il ne ressentait pas une certaine nostalgie en repensant à ses débuts. Après avoir rapidement indiqué comment était l’ambiance d’antan alors que les studios étaient beaucoup moins hiérarchisés qu’à l’heure actuelle, où tout le monde mettait en quelque sorte la main à la pâte pour être finalement débordé par le travail, Shigeru Miyamoto apprécie aujourd’hui être entouré de jeunes game designers talentueux, peut-être une façon pour lui d’enfoncer encore le clou et d’avouer cette fois à mot couvert que la relève semble bel et bien assurée chez Nintendo. La boucle est bouclée.